Partie 10 - Réseaux Sociaux
Rappels à propos des réseaux sociaux
Avec cette nouvelle ère du web, celui-ci devient une plateforme. Les utilisateurs du web deviennent producteurs de contenu et non plus simples consommateurs d’un contenu préexistant et conçu par d’autres, la plupart du temps par des gens dont c’est le travail.
Au début du web 2.0, émergence de format comme MySpace mais aussi les plateformes de blogging (skyblog, etc.), très populaires. Puis à partir de 2007, émergence de facebook mais aussi de twitter (créé en 2006). A partir de 2010, émergence de nouveaux réseaux sociaux, qui passent beaucoup plus par l’image et aussi par l’instantanéité (repose sur des « story »). Snapchat (lancement en 2011), mais aussi Instagram et plus récemment TikTok.
Réseaux sociaux en 10/2021 (source: statista.com)
Les aspects positifs des RS
- Libération de parole citoyenne, politique notamment - e.g., printemps arabe - cf., le livre de Zeynep Tufekci, Twitter et les gaz lacrymogènes. Forces et fragilités de la contestation connectée - où les réseaux ont joué un rôle très fort dans la communication et la mobilisation des citoyens dans des pays ou les média officiels étaient contrôlés par le pouvoir. (Ted talk de Zynep T. en anglais, sous-titré en français - les réseaux sociaux facilitent l’organisation de la contestation sociale mais en compromettent les chances de succès).
- Libération et dissémination de la parole - e.g., #MeToo, hashtag emblématique utilisé par les femmes pour dénoncer les abus et violences sexuelles qu’elles ont subi. L’effet d’accumulation de ces témoignages a permis à beaucoup de se sentir moins seules et a également permis de mesurer à l’échelle mondiale l’ampleur des violences et abus sexuels commis sur les femmes.
- Olivier Ertzscheid suggère que le mouvement des Gilets Jaunes a émergé très largement grâce à facebook et notamment l’une de ses nouvelles orientations stratégiques qui a consisté à privilégier les groupes (très horizontaux et permettant une expression très libre) plutôt que les pages (très verticales, servant notamment de relais à des entreprises ou acteurs publics importants).
- Les réseaux sociaux ont également permis à de nouvelles générations de créateurs de contenu (e.g., youtubers, podcasters, musiciens...) d’émerger et de se faire reconnaitre sans en passer par la voie étroite et difficile du relai sur les grands médias traditionnels, et de proposer également de nouvelles formes de création (e.g., la culture des mèmes).
- Sur les réseaux sociaux également, beaucoup d’usages, de partages et de rencontres se sont inventés. Les professionnels d’un même secteur peuvent partager leurs expériences sur des sujets variés, leurs préoccupations, s’entre-aider, se donner des conseils, prolongeant ce que Etienne Wenger a appelé des « communautés de pratiques » (2005). Les gens peuvent également partager autour de vécus, d’expériences, joyeuses ou au contraire douloureuses (l’angoisse provoquée par la crainte du réchauffement climatique, par exemple).
- Enfin une des conséquences les plus évidentes de réseaux sociaux qui nous connectent pour peu que nous ayons une connexion internet, où que nous soyons dans le monde, est de créer un contact immédiat entre des régions du monde parfois très éloignées. C’est grâce à cela que nous apprenons quasiment en direct l’explosion meurtrière de Beyrouth et que la révolte contre la corruption des élites libanaises a pu prendre rapidement une ampleur importante. C’est aussi grâce à cela que nous apprenons qu’une jeune suédoise obstinée proteste contre l’inaction climatique (Greta Thunberg) et que son geste inspire des étudiants et des lycéens dans le monde entier.
Les aspects négatifs des RS
Des effets négatifs volontaires, i.e., directement liés à la conception des réseaux sociaux:
- L’un des premiers effets à mentionner et celui qui résulte des dark patterns (en français : interface truquée). Les réseaux sociaux sont truffés de dark patterns pour nous inciter à les utiliser davantage, à y passer davantage de temps, à cliquer sur les publications des annonceurs, etc. Ces fonctions sont tellement essentielles au fonctionnement des RS qu’on parle même d’une économie de l’attention pour désigner toutes ces méthodes de captation de l’attention.
- Ce temps que nous passons sur les réseaux n’est pas sans impact sur notre santé, notamment psychologique. Et ces effets peuvent varier en fonction des réseaux. Instagram serait le réseau qui nuit le plus à la santé mentale des jeunes de 14 à 24 ans alors que YouTube, par opposition, est associé à des effets plus positifs. On peut l’expliquer à cause de la culture de l’apparence et de la mise en scène qui règne sur instagram qui laisse croire que beaucoup vivent une vie hautement désirable, ont une apparence irréprochable, etc. « Minimal » est un plugin qui entend lutter contre certain dark patterns.
- Parmi les autres effets négatifs volontairement mis en place, citons la captation des données. Facebook capte par exemple les données de ses utilisateurs quand ils utilisent facebook ou un autre site qui lui appartient (instagram, par exemple) mais aussi quand ils naviguent tout simplement sur d’autres pages sur le web. Le plugin « Facebook container » sur Mozilla Firefox empêche facebook de collecter des données sur d’autres sites web que le sien.
- Enfin, on disait que les réseaux ont permis à des mouvements comme le printemps arabe d’éclore mais les régimes autoritaires ont depuis appris à maitriser les réseaux et on réussi à en faire des outils de surveillance de masse où ils peuvent asseoir leur emprise.
Des effets négatifs involontaires, i.e., conséquences indirectes de la conception des réseaux sociaux:
- Les effets de harcèlement possible par les réseaux sociaux, de pression psychologique avec toutes les conséquences dramatiques que l’on connait, notamment chez les plus jeunes.
- Il faut également mentionner la diffusion de contenus choquants ou inappropriés qui est très difficile à contrôler pour les réseaux sociaux dont le principe repose justement sur une libre expression des utilisateurs. Le contrôle est assuré par des petites équipes de modération (laissées rarement indemnes par ce travail) et des outils algorithmiques ainsi que par les utilisateurs eux-mêmes qui peuvent reporter les contenus inappropriés.
- En contrepartie de cette circulation des contenus choquants ou inappropriés, il y a sur les réseaux sociaux une forme de censure et d’encadrement de la liberté d’expression qui ne répond pas toujours à des critères évidents et partagés par tous les utilisateurs (nudité, harcellement...).
- La circulation de ce qu’on appelle les fake news et plus généralement la déstabilisation politique (e.g., le cas Cambridge Analytica pendant l’élection présidentielle américaine de 2017). https://fr.wikipedia.org/wiki/Scandale_Facebook-Cambridge_Analytica . Donald Trump a eu recours aux services de Cambridge Analytica pour son élection.
Certains réseaux alternatifs existent et ne demandent qu’à se développer. Par exemple:
- Mastodon, l’alternative libre et décentralisée à Twitter.
- Diaspora, l’alternative à facebook
- PeerTube, l’alternative à YouTube
- nextcloud, alternative à Office365
- signal, alternative à WhatsApp
- Autres alternatives sur framasoft.org
Réseaux sociaux dans la recherche d’information
Les réseaux sociaux sont devenus un outil majeur de circulation de l’information.
Les réseaux sociaux et Facebook en premier lieu sont devenus un moyen d’accès privilégié à l’information, notamment avec l’essor des smartphones. Les gens utilisent davantage facebook que les autres réseaux sociaux pour s’informer.
Un des effets de ce changement, c’est l’émergence de média complètement conçus pour fonctionner sur les réseaux sociaux comme par exemple Brut. Le format des publications Brut est complètement adapté au réseaux sociaux et aux smartphones puisqu’il s’agit de vidéo, avec un texte en gros caractères qui permet de retenir l’information sans avoir le son (notamment grace au dark pattern de l’auto-play par lequel les vidéos se lancent toutes seules dès qu’on les voit).
Les acteurs traditionnels, média ou politiques, s’adaptent à ce nouveau contexte et cette place incontournable que prennent les réseaux sociaux dans l’accès à l’information et même l’acutalité politique.
Par exemple la chaine Accropolis sur la plateforme de streaming (diffusion vidéo) de jeux vidéo twitch qui vulgarise les contenus politiques à destination d’un public jeune. Le youtubeur Hugo Travers a lancé une chaine youtube pour décrypter la politique à l’attention d’un public plus jeune et pas forcément très informé des codes politiques traditionnels.
Réseaux sociaux dans la recherche d’information
Ce qui est possible sur des réseaux sociaux
- Accéder à des informations absents des médias traditionnels
- Donner accès à des témoignages, à des retours d’expériences, à des vécus
- Echanger avec d’autres sur nos idées
- Rester en veille, à l’affût des dernières actualités sur un sujet qui nous intéresse (e.g., groupes de discussion ou une chaine)
Ce qui est impossible sur les réseaux sociaux
- Vérifier une information, l’authentifier, accéder aux sources (dans la plupart des cas)
- Accéder à une vérité cachée et introuvable ailleurs
- Approfondir un sujet, comprendre en profondeur un problème, un sujet, etc. (sauf losrque le réseau social est lui-même objet d’étude)
- Effectuez deux recherches d’information sur les réseaux sociaux pour votre sujet.
- Expliquez votre cheminement, les fonctions utilisées (moteur de recherche interne, groupe, mots-clés, abonnement, etc.) et évaluez le résultat de votre recherche et sa fiabilité en quelques phrases.
Le résultat de la recherche peut être interne ou externe aux réseaux sociaux (article partagé sur facebook, etc.).
Quelques liens